Le débat jeudi, c'est vrai, fut long, intéressant plus apaisé que les précédents. Je souhaite toutefois revenir sur certains points car, vendredi matin, j'avais un peu la gueule de bois...
Gueule de bois en constatant qu'une municipalité de gauche va faire installer des caméras de vidéo-surveillance dans ma ville, celle où je vis depuis 60 ans. Comment, pour les gens de ma génération, ne pas penser au roman de notre jeunesse de G. Orwell, « 1984 » qui décrit un monde totalitaire et hyper-surveillé ? Je croyais depuis toujours que la gauche serait porteuse de valeurs plus humaines et donc, constituerait un rempart contre le type de société à la « Big-Brother ». Force est de constater que ce n'est plus le cas : une majorité s'est dégagée sur un vote commun PS-UMP.
Dur d'entendre une porte-parole de l'UMP affirmer qu'elle aurait pu tenir le discours introductif du maire justifiant l'installation de 14 caméras.
Dur aussi de voir les tweets qui circulaient pendant les débats accusant les opposants de tous les maux, voire de tenir des « propos idéologiques ».
Cette installation de 14 caméras, d'après les artisans du projet, serait une expérimentation. Comment croire qu'on investisse 160 000 € dans ce qui ne serait qu'une expérimentation ?
J'ai essayé de démontrer que, avant d'investir 160 000 €, on pouvait s'intéresser à ce qui se passait dans d'autres villes de la taille de celle du Mans. Et entre autres à Amiens...
La municipalité de gauche a hérité de 48 caméras de l'ancien maire et ministre Gilles de Robien. Plutôt que de continuer l'installation prévue (100 caméras), elle a préféré engager un moratoire sur le sujet et demander un audit à la société Althing, c'est à dire la société qui a préconisé l'installation de caméras au Mans.
L'audit est sans appel (c'est
ICI) et j'ai rappelé un élément de sa conclusion : «
[...] le dispositif de vidéo-protection ne répond pas pleinement aux attentes : le très faible nombre de réquisitions émises par la police traduit le faible impact de celui-ci ».
J'ai également rappelé les écrits de Gilles Demailly, maire socialiste d'Amiens : «
La vidéo-surveillance s'est peu à peu déployée sur le territoire. Si cela permet de résoudre certains délits et de dissuader cerains comportements délinquants, le rapport entre le coût du dispositif et des avantages qu'en retirent police nationale et police municipale est limité. »
Je ne peux me satisfaire des réponses qui m'ont été apportées : «
la politique municipale du Mans se fait au Mans » ou encore «
Pourquoi l'adjointe à la tranquillité Verte d'Amiens n'a pris pas la décision de supprimer les caméras ? »
Fallait-il mettre au rebut 800 000 € d'investissements, prix des 48 caméras ? L'équipe municipale d'Amiens a préféré son redéploiement. Mais il ne s'agit, en aucun cas, de la validation de l'efficacité de la vidéo-surveillance comme on a tenté de nous le faire croire jeudi soir. De plus, l'adjointe n'est plus chez Europe Écologie les Verts (c'est
LÀ).
On nous a vanté également le côté « light » de la solution choisie pour Le Mans (enregistrement des images entre 21 h et 7h30 et visualisation a posteriori). Deux choses :
• Comment croire à l'efficacité de cette solution alors que dans sa première étude d'opportunité, la société Althing, déclarait : «
[...] les dispositifs qui ne fonctionnent pas avec une exploitation en temps réel mais avec un simple enregistrement des images perdent de leur impact et de leur efficacité ».
• Comment croire également que l'on en reste là ? Dans le cahier des charges, dans la fiche Centralisation et Traitement, on lit : «
Les images issues des points de saisie des données devront être visualisables depuis le bureau du Directeur de la Tranquillité Publique » et encore mieux, «
depuis le Commissariat de Police ». Effectivement, tout est prévu... pour aller plus loin.
Les élections municipales approchent, le ministre de l'intérieur Manuel Valls et sa politique sécuritaire surfent sur une vague de sondages très favorables, alors il ne faut pas laisser le volet de la sécurité à la droite. La vidéo-surveillance ne serait-elle donc que poudre de perlimpinpin en vue des élections municipales de 2014 ?
Non, je n'ai pas une vision angélique des problèmes d'insécurité, mais... Oui, j'ai vraiment mal du côté gauche !